Pour que la colonisation européenne
devienne possible, il fallait que cette
image négative soit modifiée
et que l'Ouest soit perçu comme
un environnement plus accueillant.
Les premières tentatives des
Européens pour comprendre la
géographie du vaste territoire
de l'Ouest canadien sont souvent mal
conçues et lacunaires. L'isolement
de la région par rapport à
l'Europe et les problèmes à
surmonter pour l'atteindre en traversant
le Bouclier canadien ralentissent
son intégration au continent
européen pendant plusieurs
centaines d'années.
Les premiers Européens à
s'aventurer à l'intérieur
de l'Ouest canadien le font à
partir du nord, par la baie d'Hudson.
Leur quête est d'abord centrée
sur l'insaisissable passage
du Nord-Ouest, la légendaire
voie navigable qui, espèrent-ils,
les conduira aux richesses de l'Orient.
Ces intrus européens découvrent
plutôt par hasard la lucrative
traite des
fourrures et, le 2 mai 1670, le
roi Charles II accorde au « gouverneur
et à la compagnie
des aventuriers d'Angleterre faisant
le commerce dans la baie d'Hudson »
(aujourd'hui la Compagnie de la Baie d'Hudson)
des droits exclusifs
sur cette ressource naturelle. Le
cousin du roi, le prince Rupert, devient
gouverneur de la compagnie et on appelle
Terre de Rupert les 7,7 millions de
kilomètres carrés dont
lui et ses amis sont nommés
les « seigneurs et propriétaires
véritables et absolus ».
Pendant près de 200 ans, la
traite des fourrures entre les Premières
Nations et les Européens est
l'activité commerciale dominante
sur la Terre de Rupert et façonne
en bonne partie la perception qu'a
le monde extérieur de cette
région : une vaste étendue
inhospitalière. « Ces
grandes plaines, écrit le négociant
en fourrures David Thompson, semblent
avoir été données
depuis toujours par la Providence
aux Peaux-Rouges, comme les déserts
sauvages d'Afrique l'ont été
aux Arabes. » [Traduction] Cette
image se révèle bien
utile à la Compagnie de la
Baie d'Hudson. Elle contribue à
limiter le peuplement de la Terre
de Rupert et permet aux négociants
de s'adonner à leur commerce
à l'abri des influences de
la « civilisation ». Des
intérêts aussi étroits
et la diminution des ressources disponibles
amènent finalement les diverses
cultures
qui cohabitent sur la Terre de Rupert
à entrer en conflit.
Alarmé par l'accroissement
rapide de l'autorité des Américains
sur tout le continent au milieu du
dix-neuvième siècle,
le Canada-Ouest (aujourd'hui l'Ontario)
se met à considérer
la Terre de Rupert comme un moyen
d'assurer des liens avec les colonies
britanniques de la côte ouest
et de construire son propre empire
économique. Disposant de peu
de renseignements détaillés
sur la géographie de l'Ouest,
les expansionnistes canadiens entreprennent
des expéditions
scientifiques pour dresser l'inventaire
des richesses naturelles abondantes
qui semblent attendre d'être
exploitées par les Européens.
Comme il fallait s'y attendre, ces
explorations amènent ceux qui
y participent à brosser le
portrait d'un pays offrant des promesses
illimitées.
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